Quel est mon projet avec eux ?
Je les soutiens dans le comité de pilotage puis j’interviens en tant que acteur et auteur. Je tiendrai un stand pour mon livre et je jouerai en exclusivité ma future pièce de théâtre sur la surdité le matin à 11h15 !
Un sacré projet en vue avec une équipe de feu!
Je n’ai plus mal Papa. Je vais mieux. Je peux t’écrire. Maman n’a pas réussi à me tuer. Je suis sûr que c’est toi, quelque part qui m’a protégé. Tu dois penser à moi pour que je réussisse à vivre. Je respire doucement, allongé à moitié sur mon lit d’hôpital. Je suis heureux de pouvoir t’écrire. Soulagé d’être loin de la maison. Ici, je suis en sécurité. Les infirmières sont très gentilles dont une très mignonne qui change mes pansements. Mes jambes sont dans le plâtre. Je ne pourrai pas marcher avant longtemps. Mais je remarcherai, ça c’est sur et j’irai à ta recherche. J’irai vivre avec toi. Pour l’instant, il me faut être soigné. C’est étrange, je ne suis plus en colère. Peut-être que je suis loin de ma « famille ». Un de mes potes, Phil, est venu me voir avant que je t’écrive. Il m’a apporté pleins de BD et une grande carte avec pleins de signatures. Je me sens moins seul. Merci Papa…. Je reprends vite mon stylo pour te dire que deux clowns viennent me rendre visite. J’ai accepté leurs venues. Je te raconterai ça.
Me voici, Papa. Je te remets ma colère envers maman. Enfin, celle qui est censé être ma mère. Pourquoi me hais-t-elle ? Nous sommes bien allés chez le médecin hier pour Loufi. J’étais resté dans la salle d’attente. Quand ils sont sortis du cabinet, le médecin m’a aperçu et a demandé de me voir. Ma mère a refusé sous prétexte que je vais très bien. Je me suis levé pour essayer au cas où. Elle m’a regardé sévèrement, avec des yeux noirs. Je n’ai pas eu peur. Je suis passé devant elle et m’a murmuré que j’allais passer un mauvais quart d’heure. Le médecin n’a pas entendu mais il me semblait qu’il avait deviné. Il a assuré à ma mère qu’il n’en avait pas pour longtemps. C’est vrai que c’était court mais ô combien intense et libérateur. Il m’a ausculté et posé quelques questions. Puis discrètement, il m’a dit : « Je vais voir ce que je peux faire pour toi. » Je me suis senti écouté, entendu. Cela m’avait fait un bien fou. Tellement cela m’avait fait du bien que cela m’a donné de la force pour la suite. Je savais bien ce qui allait m’arriver. Mais pas complètement. J’ai connu pire. Nous sommes rentrés à la maison après avoir déposé Loufi à l’école. En arrivant au bas de l’immeuble, elle m’a emmené à la cave et frappé. Elle m’a enfermé et m’a menacé qu’elle me tuerait si je la dénonçais. Alors je suis resté toute la journée d’hier dans le noir, avec à peine de l’air qui arrivait par une petite fenêtre. J’avais attendu jusqu’au soir à rester à peine allongé tellement il y avait le bazar. Maman m’a ramené à l’appart. J’ai été assommé par la lumière et la fatigue. J’ai pu boire et me suis écroulé sur mon matelas.
Voilà, Papa, Maman est sorti et m’a enfermé à clé. Je suis trop faible pour m’enfuir et même pour crier. Mais j’ai de la force pour t’écrire et te dire ma haine envers ma mère.
Enfin, je t’écris Papa. Je m’appelle Rami si tu te souviens. Mon nom de famille ? Je ne sais pas. Maman s’est mariée quatre fois. Tu as disparu de la nature avant que je naisse, il y a 14 ans. Je n’ai jamais entendu parler de toi. Si je pose la moindre question à ma mère, elle me fout une torgnole. Alors, je ne dis rien. Je suis content de prendre le temps de t’écrire sur un petit cahier que j’ai reçu d’un de mes profs. Il fait sombre dans le salon. Tout le monde dort sur les matelas en mousse. Je suis sur le rebord de la fenêtre et je suis éclairée grâce au projecteur qui éclaire toute la rue. Nous habitons dans un immense immeuble. J’ai une superbe vue sur des usines qui crachent du feu, jour et nuit. Aujourd’hui, je me suis allé balader avec mon petit frère Loufi dans un terrain vague. Nous avons joué avec des morceaux de ferrailles, des pneus où l’on s’amuse à sauter dessus. C’était géant. Loufi a cassé des vitres d’une maison abandonnée à l’aide de briques. On s’est fait engueulé et nous avons beaucoup ri.
Mais ce soir, je t’écris car j’ai mal au ventre et en haut de mes jambes. Cela dure depuis des jours mais je ne dis rien à ma mère. Elle te traite souvent d’hypocondriaque. Je ne sais pas vraiment ce que ça veut dire mais j’imagine. Pour elle, c’est de la comédie pour ne pas aller à l’école. De toute façon, l’école, je n’arrive pas à suivre. Je suis trop fatigué. Je suis souvent fatigué et mes nuits sont agités. C’est-à-dire que je fais régulièrement des cauchemars. Parfois, j’ai une boule qui me reste dans la gorge. Je parle très peu et pourtant, je ne me débrouille pas trop mal à l’écrit. La preuve, je prends du plaisir.
Papa, j’essaie de t’imaginer. Tu dois être noir. Puisque Maman est blanche et moi, je suis brun. Loufi est blond, son papa était suédois, le troisième de maman.
J’imagine que t’as dû être un héros. Comme Maman serait tellement jalouse de toi qu’elle voudrait complètement t’oublier. Enfin, je voudrais rêver que tu sois un homme énorme, puissant. T’imaginer me permet de rester debout. Ma mère ne s’occupe pas vraiment de moi. Je suis juste bon à l’accompagner au marché et porter les lourds sacs, à faire le ménage et à m’occuper de Loufi.
Je vais te laisser Papa. Je m’endors. Demain matin, Maman doit nous emmener chez le médecin pour mon petit frère. J’en aurai bien besoin aussi.