Pour tout te dire, je ne comprends pas tout mais entre ce que j’entends et l’expression du visage et le contexte peut m’aider. Je fais beaucoup de suppléance mentale, c’est dire que je tente souvent de deviner le sens de la phrase. Parfois, je répète ce que j’ai entendu pour être sûr.
Bonjour tout le monde, Comme certains et certaines le savent, je peux très bien entendre au téléphone grâce à mon appareil auditif. Mais, vous en doutez bien, cela ne marche pas souvent quand il y a un très mauvais réseau, ou bien l’acoustique est mauvais entre les deux téléphones. Et puis surtout, si je ne connais pas la voix de la personne avec son ton et son débit. C’est ce qui m’est arrivé hier soir. J’ai reçu un coup de téléphone d’un inconnu. Déjà, le son est étouffé et résonne un peu. Je comprends un mot sur trois. Mon interlocuteur parle un peu vite en m’expliquant son projet et comment il a eu mon téléphone. Je lui ai expliqué que j’étais sourd et je l’ai invité à m’écrire pour pouvoir répondre à sa demande correctement. Pour l’instant, aucune nouvelle !
Bref, pour appeler au téléphone une personne sourde, en capacité d’entendre évidemment : – Veillez à être dans un environnement calme pour ne pas avoir de bruits parasites. (Vous êtes sur un chantier ? Demandez une pause aux ouvriers, ils seront ravis). – Parlez distinctement avec un débit tranquille. Prenez votre temps. (pas trop non plus !) – Prenez une voix posée et pas trop bas ! (A moins que vous êtes au cimetière et que vous avez peur de réveillez les défunts, on ne sait jamais par les temps qui courent). – Et le must, confirmez par mail les informations données. Une personne prévenue deux fois en vaut mille ! (Vivien, c’est un homme averti en vaut deux)
Mais Vivien, il existe d’autres moyens de téléphoner ?
Bien sûr, il existe des relais-téléphoniques tel qu’Acceo et Elioz qui font de la retranscription ou de l’interprétariat LSF, Puis Rogervoice qui sous-titrent les appels. Il existe aussi des téléphones amplificateurs ou des systèmes Bluetooth. Mais la technologie ne remplacera jamais le lien entre les deux personnes, et la personne sourde reste toujours sourde!
Je me révolte contre des personnes qui mettent les sourds dans des cases.
Je me révolte contre des sourds qui font aussi de la discrimination et font des généralités.
Je suis révolté contre les personnes eux-même entendants, qui signent et se permettent de catégoriser les sourds, genre cette personne ne signe pas donc elle n’est pas sourde.
Ouvrez grands vos yeux et vos oreilles.
Un sourd peut entendre avec ses aides auditives et signer.
Un sourd peut parler même s’il signe.
Un sourd peut parler sans signer.
Un sourd peut avoir un implant.
Un sourd peut coder ou pas.
Un sourd peut lire sur les lèvres ou pas.
Un sourd peut écrire super bien ou très mal.
Un sourd est un homme comme les autres avec ses qualités et ses défauts.
Je considère qu’une personne est sourde quand elle est connait vraiment le monde du silence avec aides auditives ou pas.
Mais attention, nous ne nous résumons pas à notre surdité.
Nous avons une personnalité qui a été façonnée par notre histoire, par notre famille et nos amis, par l’école et la société. La surdité a bien sur un impact dans notre identité mais tout ce que l’on fait, tout ce que l’on est, n’est pas dû à notre surdité.
De quel droit juge t-on l’autre personne sourde avec ses moyens de communications ?
Si on a soi-même un cancer, juge t-on un cancéreux à différentes phases ? Est-ce qu’on lui impose notre façon de voir la maladie, le traitement à faire ?
Chacun est libre de son choix, et parfois même, il n’a pas eu le choix (Choix fait par les parents ou par des professionnels).
Arrêtons de généraliser et sachons écouter, entendre, surtout observer sans critiquer. Essayons de comprendre même si on n’est pas d’accord.
Mais je reconnais bien sur que ce n’est pas facile pour certains, à cause de leur histoire, à cause de leurs souffrances conscients ou inconscientes, à cause des déceptions, des désillusions.
Pour ce qui ne savent pas, je suis sourd appareillé oralisant et je parle très bien. Cela fait illusion souvent. Et quand j’enlève mes appareils, je n’entends vraiment rien. Je suis malentendant avec mes appareils. Je suis sourd sans mes appareils. Tout dépend du contexte.
Maintenant ce que c’est écrit, je ne suis plus en colère! Ouf ! Fallait que ça sorte et que surtout dialoguons et écoutons-nous pour comprendre nos différences et nos choix.
Après mon article « Etre un père parfait ?« , je souhaitais vous partager mon expérience de père sourd. C’est évident, je suis loin d’être parfait. Personne n’est parfait et c’est tant mieux. Quel ennui si tout était dans la perfection, n’est-ce pas ? Je n’ai pas à être parfait mais à faire de mon mieux, avec les outils que j’ai à disposition (Lectures de livres, discussions et échanges d’expériences avec des amis etc.). J’apprendre à être père tous les jours, sourd ou pas. Alors bien sûr je précise, je parle en tant que sourd oralisant appareillé, ce qui n’est pas du tout le même quotidien qu’un sourd signant ou bien même un sourd appareillé mais qui a besoin plus d’aides techniques ou d’aide à la lecture labiale etc. Chaque personne sourde s’adapte et adapte son environnement en fonction de ses besoins. Pour ma part, je communique à l’oral avec ma famille (mère entendante et fille entendante).
Au passage, j’ai fait une carte mentale pour montrer la diversité du monde des sourds :
Est-ce que ta surdité te joue des tours ? Bien sûr, c’est plus drôle. Cela pimente mon quotidien avec des malentendues, des quiproquos. On peut avoir des fous rires quand je répète un mot qu’il me semblait avoir entendu. « Mais non, Papa, ce n’est pas ce que j’ai dit » Effectivement, il peut y avoir des tensions liés à la fatigue. Mais c’est pareil pour tout le monde. Et pourtant, ma surdité m’apporte une certaine intolérance au bruit, et surtout cris aigues. Tout est exacerbé. C’est pour ça que je savoure encore plus les silences et que j’admire plus ma fille quand elle dort. Même si parfois, je ne comprends pas tout ce qu’elle dit, je peux la comprendre au niveau non-verbal car elle est très expressive. Je ne sais pas de qui ça vient. Puis elle parle assez fort, comme euh…. son père. Un peu trop même. On s’entraine à poser notre voix et à parler calmement, au grand bonheur des oreilles de ma femme. On essaie d’instaurer un cadre calme car elle crie beaucoup hélas. C’est de son âge et c’est juste un passage délicat à prendre avec patience et diplomatie. J’entends très bien avec mon appareil auditif… enfin tout est relatif bien sûr. Quand « j’entends du silence », je préfère vérifier si tout se passe bien et généralement, elle fait des expériences pas très jolies jolies :-D. Cela arrive fréquemment que ma fille m’appelle et que je ne réponds pas. Quand ma femme est là, elle lui rappelle : « Papa ne t’entends pas, va le voir ». Et quand je suis seul avec elle, elle crie plus fort. Bon là, je l’entends ! Oups!
Et la langue des signes ? Ma fille n’utilise plus qu’un seul signe : « S’il te plait ». Elle est complètement dans la parole. Je n’ai pas besoin que nous échangions en langue des signes puisque ce n’est pas ma langue maternelle. De temps en temps, je lui apprends l’alphabet, quelques signes d’animaux ou de couleurs. Mais sans plus. Plus jeune, elle a été initié au bébé signes et je pense que cela beaucoup aidé dans le langage par la suite.
Et ton appareil auditif ? Elle fait bien attention même si elle est tenté de le toucher. Elle a bien compris que cela me servait à entendre donc elle n’y touche pas. C’est plus difficile avec mes lunettes mais ça c’est une autre histoire. Parfois, au réveil, elle prends mon appareil auditif posé sur ma table de nuit et me le tend pour que je le mette. Toujours très appréciable.
Et la nuit Vivien ? C’est ma femme qui me reveille si besoin, pour que je prenne le relais. Elle me secoue l’épaule plusieurs fois et cela suffit pour me réveiller. Dans ce cas, je suis obligé de mettre mon appareil auditif et prends la suite. Et quand je suis tout seul ? J’ai un babyphone vibrant que je mets au poignet. J’ai rarement eu l’occasion de le mettre. Et le matin, j’ai un réveil lumineux qui éclaire tout doucement. Pratique pour ne pas réveiller notre fille dans la chambre… si elle dort ! Pour le réveil lumineux, c’est juste un réveil que nous avions acheté à Nature et découverte à prix raisonnable.
Quels autres « sens » un « papa sourd » développe t il plus ? Je dirai plutôt la vue. Je suis assez observateur c’est vrai mais c’est vraiment au cas par cas. Chacun compense en fonction de ce qu’il a appris ou avec expérience.
Pour ceux qui ne connaissent pas la vidéo où j »évoque mes débuts de Papa, la voici :
Au plaisir de continuer à échanger avec vous et mettez vos témoignages dans les commentaires. Cela peut éclairer les entendants qui ne connaissent pas la surdité.
Avant de réaliser une vidéo très prochainement, je voulais vous offrir un panel de blogs écrits par des personnes sourdes et malentendants. Pourquoi ? Déjà pour se sentir moins seul par ceux qui se sentent concernés par la surdité. Je précise bien sûr que certains ne parlent pas forcément que de la surdité. Nous ne mettons pas la vie en sourdine, n’est-ce pas ?
Voici donc la liste (je m’inspire très largement du blog Maman n’entends pas) :
. Commençons donc par
Laure de Maman n’entend pas. Elle partage pleins d’idées, de vécus sur plusieurs thématiques autour de la surdité, et bien sûr en tant que mère d’enfants entendants. Sacré programme !
Sophie Drouvroy, maman sourde et implantée récemment, partage ses expériences et son vécu autour de l’implantation dans ma ‘Vis ma vie de sourde’ : https://www.sophie-drouvroy.com
Decibelany tient un blog de femme et maman malentendante de 2 enfants, en proposant 3 thèmes de lecture (femme, maman, malentendante) (Là, je reconnais j’ai fais du copié/collé sur le site de Laure: https://decibelany.wordpress.com
‘Ma vie entre deux mondes’, Foeby Anne, maman malentendante, s’exprime sur plusieurs thèmes (fan ou pas, bien-être…) : http://www.maman-malentendante.com
Et hop des sites non évoqués par Laure :
https://www.jesuismalentendant.com (Très informatif avec des témoignages et des conseils) écrit par Angélique, sourde et assistante audioprothésiste.
https://liseusehyperfertile.wordpress.com/ Une mystérieuse sourde surnommée MadameOurse qui anime le blog avec pleins de fiches de lectures, et parfois des livres écrits par des sourds ou des héros sourds.
Un site crée par Florian très complet sur le monde des sourds sur le versant aides techniques, technologies etc , à découvrir : http://le-monde-des-sourds.fr/
et sûrement pleins d’autres que je compléterais en fonction des retours 🙂
Si vous en connaissez d’autres, je les rajouterai dans la liste.
Déjà, c’est très subjectif car tout dépend du vécu de la personne, comment elle est sourde etc…. Pour ma part, j’ai deux types de silences qui sont complètement opposés. Effectivement, même sourd, le silence peut être oppressant pour moi.
Mais dans des situations bien particulières quand mon appareil tombe en panne. C’est quand je subis le silence. Un silence où j’ai envie d’entendre, d’entrer en lien, c’est particulièrement angoissant. Le son est pour moi précieux. Il indique la vie qui bouge et vibre autour de moi.
Alors quand je choisis le silence, comme couper mon appareil après une journée bruyante, ou dans un bus etc…, cela me fait un bien fou. Cela me repose. J’en profite pour me ressourcer, respirer, observer, admirer et déployer d’autres sens que l’ouïe. Je le fais quand je me sens en sécurité, quand j’estime que je ne vais pas me mettre en danger.
Un silence apaisant pour me reposer.
Une musique sans sons pour faire danser au repos mes neurones.
Un vrai silence où je peux entendre à peine un bruit avec mon appareil.
Un silence où les couleurs du monde prennent forme.
Un silence où les silhouettes se détachent de mon horizon.
Une harmonie du vide sonore pour mieux percevoir d’autres sens.
Pour mieux sentir les odeurs des fleurs ou le parfum d’une femme.
Pour mieux sentir une peau douce, un bois travaillé, une peluche d’un enfant.
Pour mieux saisir les saveurs subtiles d’un curry d’agneau, d’un dessert au chocolat.
Pour mieux voir les détails d’un tableau ou les insectes dans l’herbe.
C’est vrai que l’on peut avoir peur du silence, pour ne pas se retrouver.
Peur de se laisser déborder par des émotions ou des idées noires.
Crainte de s’ouvrir à l’inconnu et de se laisser surprendre par des bruits inattendus.
Y a-t-il des vrais silences ?
Dans le désert ? Dans la campagne profonde sans âme qui vive ?
Puis y a du bruit dans la tête avec toutes nos idées qui se bousculent, nos mots qui s’entrechoquent.
Dans le silence extérieur, on peut entendre notre corps.
Comme le corps qui bat rapidement pensant que l’on marche dans le grenier.
Comme le ventre qui gargouille croyant que c’est le parquet qui grince.
Pour ma part, je peux l’entendre avec mon appareil. Sans, rien du tout.
Le silence s’apprivoise.
C’est notre état intérieur qui fait que le silence est pesant ou pas.
Etant sourd, on pourrait croire que j’ai une voix bizarre, comme un accent belge ou alsacien.
Les gens s’imagineraient que j’ai des petits pois dans la bouche.
Point du tout, je parle très bien. Et pour moi, la parole est vitale.
Le son qui sort de ma bouche me libère et extériorise ce que je ressens.
J’ai cette chance d’avoir eu au moins 13 ans d’orthophonie. J’ai vraiment commencé à parler à 5 ans. Je devais sans doute parler fort ou mal. J’ai beaucoup appris. Surtout pour l’articulation.
J’ai appris aussi à poser ma voix. Ce qui m’a beaucoup aidé, c’est le théâtre, la lecture.
C’est un pur plaisir pour moi de lire à haute voix, quand j’ai bien sur travaillé le texte avant.
Je ne vous cache pas qu’il y a des faiblesses quand je fatigue. Mes mots raccourcissent et je finis pas ma phrase.
La parole est primordiale pour moi. Elle m’aide à m’ouvrir, à être entendu, à être reconnu.
Non, certains d’entre-vous savent bien que je ne m’exprime pas en langue des signes. Ce n’est pas ma langue maternelle même si je suis sourd de naissance. Je m’en sers parfois avec ma femme quand mes piles tombent en panne. Mais je ne peux pas me passer des appareils.
J’ai besoin d’entendre et de m’entendre.
Je comprends que l’on ne veuille pas parler quand on n’entend pas sa voix ou quand ça dérange, ça titille, ça fait une voix de canard ou une voix nasillarde.
Cela me met en colère quand je lis des témoignages d’enfants sourds où des professionnelles disent aux parents, il ne parlera jamais etc… Qu’est-ce qu’ils en savent ?
N’ayez pas de peur de la voix car elle sort du ventre, lieu des émotions. Des sons sortent, elles sont nécessaires.
Je reconnais qu’il y a des personnes sourdes qui auront des difficultés à parler et qu’ils préfèreront la langue des signes. Et c’est tant mieux, heureusement.
Ill ne faut pas oublier non plus qu’il y a des sourds oralisants, comme moi, qui existent et qui sont plus nombreux qu’on ne le pense. Parce qu’ils se fondent « plus facilement dans le monde des entendants ». C’est difficile de de différencier tellement les profils des personnes sont différents.
N’ayons pas peur d’apprivoiser notre voix, quand c’est possible.
Aux amis sourds et même pour ceux qui ont un autre handicap ou une maladie invalidante, ne brisez pas vos rêves. Quels moyens vous êtes vous donnés pour réaliser vos rêves ?
Avez-vous dû vous battre contre des personnes qui ne croyaient pas en vous à cause de votre handicap ?
Je vous souhaite de concrétiser vos projets les plus fous, ou des projets qui s’en rapprochent le plus.