La bêtise de Gérard

Gérard : Maxime, j’ai quelque chose à te dire. Tu es disponible ?
Maxime : Oui, bien sûr ! Je t’écoute.
Gérard : J’ai honte.
Maxime : Et ?
Gérard : J’ai fait une bêtise.
Maxime : Au point où tu en es.
Gérard : Oh quand même. Ah ce point ?
Maxime : Tu veux que j’énumère tes faits d’armes ?
Gérard : Ce n’est pas la peine. Je les connais.
Maxime : Quelque chose que tu n’as jamais fait ?
Gérard : Oui.
Maxime : Ah tu m’inquiètes. Vol, c’est fait. Drogue, c’est fait. Contrebande, c’est fait. Alcool, c’est fait. Prostitution, c’est fait. Jeux d’argent, c’est fait (Silence). Tu as tué quelqu’un ?
Gérard : Ah non, pas à ce point-là, il y a des limites quand même.
Maxime : Cela dépend de quels limites nous parlons.
Gérard : Tu m’as bien suivi ces derniers temps, non ?
Maxime : Oui, et je trouvais que tu t’épanouissais bien dans ton travail. Attends, tu t’es fait viré ?
Gérard : Même pas !
Maxime : Là, ça aurait une belle connerie.
Gérard : Cela n’aurait pas été la première fois.
Maxime : Et on a vu ce que ça donnait à chaque fois. Bon, alors ?
Gérard : Marie-Henriette m’a embrassé.
Maxime : Sans blague ! Et ?
Gérard : J’ai refusé.
Maxime : En faisant comment ?
Gérard : Je l’ai juste repoussé délicatement et j’ai dit que ce n’était pas possible. Et que ce n’était pas réciproque.
Maxime : Tu as été honnête envers elle et envers toi-même, c’est même très bien.
Gérard : Mais elle a du fric. Elle était prête à m’épouser. Elle s’est mise même à me supplier pour qu’elle m’aide car elle m’aime.
Maxime : Je ne vois pas la bêtise, là !
Gérard : J’ai refusé une occasion de vivre dans de bonnes conditions, avec une personne qui m’aime.
Maxime : Et tu l’aimes ?
Gérard : Non.
Maxime : Et bein alors ? Tu aurais été heureux avec elle.
Gérard : Je ne crois pas non.
Maxime : Tu sais quoi ! Ce n’est pas une bêtise. C’est un exploit. Tu devrais être fier de toi même.
Gérard : C’est pas ça qui va me faire finir les fins de mois.
Maxime : C’est pas faux et faut bien un début à tout. Et tu seras largement récompensé ! Il faudra être patient, certes mais ça vaut le coup !
Gérard : Je pourrais être riche ?
Maxime : Est-on heureux quand on est riche ?
Gérard : avec un petit duvet de billets régulièrement, ça pourrait être bien pour être assuré et en sécurité.
Maxime : Je ne te dis pas le contraire. Bon, Gérard, je vais te laisser mais je te remercie de cet échange.
Gérard : Ah bon, tu me remercies ?
Maxime : Oui parce que tu me fais confiance et je vois tout l’avancée que tu fais. Cela me réjouit.
Gérard : Merci. Ah oui, au passage, j’ai eu un petit incident. J’ai rayé ta 4L avec ma brouette. Mais ne me regarde pas comme ça… Je m’en vais. Je m’en vais.

(Dialogue complètement fictif ;-))


Le cauchemar de l’éducateur

21h45. Arthus venait de faire le tour des chambres. Tout le monde semblait dormir. Un silence apaisant enveloppa le foyer. L’éducateur jetât un coup d’oeil sur la salle à manger. Tout fut rangé et nettoyé. Il se dirigea vers son bureau en laissant grande ouverte la porte, au cas où. Il s’affala enfin sur le fauteuil, avec sa tête toute embrumé de la journée. Un mini-relâchement. Il fallait qu’il tienne encore debout jusqu’à l’arrivée du veilleur de nuit. Ses yeux pouvaient tomber à tout moment comme une averse s’engouffrant dans la vallée. Un petit bruit aigue survint. Un acouphène. Cela lui arrivait de temps en temps. Cela pouvait durer quelques secondes. Le temps qu’il reprenne souffle et prenne une grande respiration.
Puis ce fut le silence complet.
Il sursauta en ouvrant ses yeux embrumés. Une lumière tamisait le couloir. Un fond sonore caressait les moindres recoins. La ventilation. Puis un tic-tac entêtant, discret dans la journée mais bruyant le soir quand aucun autre son venait perturber ces sinistres secondes s’écoulant vers l’éternité. Il n’était que 21h55.
Le veilleur allait tarder arriver. Martin était son nom. Il devrait arriver d’un instant à l’autre. Arthus crut que chaque seconde tambourinait sourdement comme si un funeste châtiment allait s’abattre.
Pour se changer les idées et ce qu’il aurait du faire, c’est noter ses observations dans le logiciel. Cela allait être rapide. Il ouvrit la fenêtre. Rien. Pas d’historique. Pas de traces sur ce qui s’était passé. Il fut saisi d’un horrible doute; Il regarde les autres fichiers. Tous vides. Même dans l’intranet, tout fut le néant. Aucun signe du passé. Où sont passés les projets écrits, les anamnèses, les circulaires, les factures, les photos du foyer ?
Arthus commença à paniquer légèrement. Très légèrement.
Il ouvrit la messagerie. Rien à part un message non lu. Cela venait de l’ARS. L’agence annonçait qu’il coupait tous les vivres du foyer, idem pour tous les établissements médico-sociaux car non rentables. Ils devaient se démerder comme les Amishs. Plus de sous. Plus de boulot.
Son coeur allait exploser… de colère, de fureur. Il devait sans doute rêver. Ce n’était pas possible autrement. Il se leva pour reprendre ses esprits. Il se retrouva dans le couloir. Un grand air glacial le fouetta. Toutes les portes des chambres étaient ouvertes, et des lumières bleues surgissaient de nulle part. Il se précipita vers la première chambre. Une chambre vide, sans plus aucun meuble. Personne. Ce fut la même chose pour les autres chambres. La sueur tombait à grosses gouttes de ses tempes. Il voulut crier mais rien ne sortit.
Soudain, un extincteur se mit à bouger et le frappa subitement sur ses épaules.
Arthus se réveilla brusquement. Martin, le veilleur l’avait secoué virilement. L’éducateur reprit ses esprits. Il s’était endormi devant l’ordinateur avec pleins de fenêtres remplis de dossiers, et la messagerie pleine. Tout était donc normal.
Arthus fit donc la relève, transmis quelques informations puis se prépara à rentrer chez lui.
Pour faire cette fois-ci des rêves.
Enfin, il espère!

Pour d’autres histoires à lire :
La fugue de l’éducateur
Le cauchemar du Veilleur de nuit
Journée fictive d’un éducateur

Un sourd silencieux – 1 – prologue

Silence complet. Enfin, la routine quoi ! Sourd de naissance, le son ne lui manquait pas. Tristan s’en passait facilement en retirant ses appareils auditifs.  Quand il voulait. Quand il pouvait. La liberté d’entendre ou de ne pas entendre. La classe, non ? Tristan trouvait que oui.

Il y avait une semaine, il avait fêté ses 25 ans avec ses potes. A moitié entendant, à moitié sourd. En nombre restreint. Pour être sûr de bien suivre à 100% et de profiter au maximum de sa soirée. Cela avait été impeccable jusqu’à ce qu’un pote d’un ami s’incrustasse en fin de soirée. Ce fut devenu l’enfer d’un instant car il parlait fort et vite, faisait des blagues sans qu’il comprenne. Heureusement, au bout de 10 minutes, ses amis lui avaient gentiment invité à visiter un bar à côté. Pour goûter un super mojito qu’il devait découvrir. Le gars était heureusement reparti et la soirée s’était finie en douceur.

Un soir printanier, Tristan était épuisé après sa journée de cours de psychologie du développement de l’enfant. Il avait utilisé son micro-HF. Une très bonne solution certes mais cela lui causait un mal de crâne pas possible. Il s’était blottit sur son canapé puis avait enlevé ses appareils auditifs. Le soleil couchant illuminait la pièce. Tristan rêvait de devenir psychologue. Quoi, pourquoi un sourd ne pourrait pas devenir psychologue ? Il existera pas mal d’aménagements possibles pour pouvoir vivre pleinement son métier. Il en est certain. Sans doute, limité mais pas impossible. Si on lui donnait les moyens, il pourrait le faire sans soucis.

Il relisait tranquillement les notes prises par un de ses collègues quand une forte vibration le fit sursauter. Il jetait un œil autour de lui. Rien. Il se précipite à la fenêtre pour voir ce qu’il s’est passé dans la rue. Rien. Enfin, rien de rien. Plus de rue. Il devait voir un immeuble en face mais là, juste le vide. Enfin, le vide, c’est une manière de dire. Il y avait un grand champ de coquelicot à perte de vue.

Tristan se retourna et alla s’asseoir sur son canapé. Il posa sa main droite sur le meuble pour récupérer ses appareils auditifs. Rien. Il inspira fort et commençait à chercher. Aucune trace de ses aides.  Tristan ne voulait pas paniquer. Cela ne servait à rien, il le savait. Et pourtant, il y avait de quoi. Qu’une rue disparaisse, c’est déjà inquiétant. Mais qu’il fut plongé dans le silence sans sa volonté, c’est le comble du comble. Il aimerait bien crier mais à quoi bon, il ne va pas s’entendre. Aucun intérêt.  Quoique !

Tristan s’était redressé brusquement car il sentit un souffle sur sa nuque. Il se retourna. Un vent de frayeur semblait sur le point de le rendre muet à vie.

(A suivre…)

Journée (fictive) d’un éducateur

Définition de fiction: histoire imaginée (inspirée probablement de faits réels) avec un langage propre au narrateur, et qui n’appartient qu’à celui l’écrit. 

8 h 17 : J’arrive au centre avec plus de retard que prévu à cause d’un foutu tracteur. Il me reste 13 minutes pour préparer la salle d’accueil pour accueillir mes petits jeunes enfants autistes. J’arrive dans le couloir menant à la salle. Il vient d’être nettoyé par la femme de ménage. Heureusement elle a ouvert les fenêtres pour que ça sèche plus vite mais ça sera vite sali. Cela fait des semaines que je lui demande de laver le couloir et la salle de groupe en premier. Mais non, elle n’en fait qu’à sa tête. Elle me voit, me salue, me fait un grand sourire. Je fais de même et lui souhaite une bonne journée.

8 h 28 : À peine fini de fignoler que j’entends une voix qui m’est bien connu : Félix. Il rentre en trombe et commence déjà à tout mettre par terre. Je le reprends avec douceur et fermeté. Je l’accompagne à l’entrée pour qu’il pose ses affaires, prenne sa photo pour le mettre sur le panneau de présence. Nous communiquons avec son classeur de PECS. Il ne s’en sort pas trop mal. Puis Calvin arrive en pleurant et vient se blottir contre moi. Sa mère, l’accompagnant, m’explique qu’elle a du confisqué son jeu électronique.

8 h 41 : mon groupe de 5 jeunes est enfin au complet se posant du mieux que possible sur un objet qui les stimule. Ma collègue arrive avec trois autres jeunes dont l’un, Firmin, a tendance à mordre et à taper tout le monde. Nous l’esquivons comme nous pouvons et essayons de le mettre dans un lieu où il sera en sécurité, pour lui et surtout pour les autres.

8 h 55 : Nous regroupons nos jeunes autour de la table pour préparer la journée. Dialogue en s’appuyant sur des photos d’activités et de personnes qui s’occupent des activités.

9 h 10 : Ma collègue Irma et moi-même prenons nos jeunes pour une activité particulière. Pour ma part, c’est peinture.

9 h 20 : J’essaie de rattraper Félix qui s’est fait la malle dans le couloir alors que les autres sont déjà dans la salle artistique.

9 h 26 : J’ai Félix mais Greg est parti entre temps pour aller aux toilettes. C’est un scoop pour lui car nous devons souvent le solliciter. Mais par contre, il risque de jouer souvent avec l’eau des toilettes. Je mets vite mes autres jeunes avec un pinceau et une grande blouse, avec des flaques de peintures sur chacun de leur feuille.

9 h 45 : Je vais enfin aller chercher Greg qui n’est pas revenu. Je le retrouve en train de jouer avec l’eau où il a fait son caca. Il y en a de partout. Et m… Je reste calme. J’en connais qui va être content de nettoyer tout ça. C’est bibi. Avec Greg, je vais chercher le nécessaire et le change entre-temps. Je n’ose pas imaginer ce que font les autres en peinture.

10 h 11 : Enfin tout nettoyé, tout propre, nous allons rejoindre les autres. J’entends des hurlements. Je fonce. Catastrophe. Tout est propre. C’est juste la petite Huguette qui s’est mis de la peinture sur ses chaussures roses de Dora. Elle s’agite dans tous les sens. Je l’amène dans la salle de décompression où un de mes collègues, Yvette se trouve.

10h18 : Rangement de l’atelier peinture pour pouvoir aller souffler en récréation. J’aide Firmin à ranger et d’un seul coup, me mord le bras. Une envie subite me prend de lui gifler mais je me contiens et respire. Douleur au niveau de ma chair bien sensible près du poignet.

10h28 : Récréation. Tous les jeunes ont mis leurs affaires pour aller dehors. Je surveille les plus dangereux et en même temps les plus vulnérables face à ceux qui sont les plus dangereux. Il me semble que je m’embrouille déjà.

10 h 38 : Greg joue au ballon avec Irma, une des éducatrices. Puis j’entends : «  Arrête de faire à l’imbécile » à Calvin qui secoue sa tête dans tous les sens. C’est encore Irma qui emploie un langage très très déplacé, même aberrant. J’aimerai bien lui foutre des baffes mais non, entre collègues, il faut être calme, courtois, poli pour ne pas contaminer le groupe.

11 h 00 : Fin de la récréation. Nous faisons rentrer tous les jeunes. Une manque à l’appel. C’est Huguette qui contemple ses chaussures roses à l’ombre d’un mur décrépi.

Chacun prend ses jeunes selon ses activités. Pour ma part, c’est temps éducatif avec Firmin. C’est idiot comme terme puisque tout est éducatif dans les ateliers, les temps de repas, etc…. Firmin est un fan de puzzle. Il peut faire des puzzles de 1000 pièces. Mais là, j’essaie de l’initier à la photo et surtout pour qu’il voit son visage. Il prend énormément de plaisir.

12H00 : Après avoir rangé l’appareil photo et divers objets que Firmin a mis en vrac, nous rejoignons les autres au self pour le repas.

13h00 : Le repas s’est passé sans trop de problèmes, a part Gaby qui a mis sa tête dans le plat de purée. Mais sinon tout va bien.

13 h 16 : Tout le groupe est réuni dans la salle de groupe. Ils sont calmes à leur manière. Pour moi, c’est calme. Je suis assez content de la matinée malgré tout.

13 h 26 : Une de mes collègues, Guinguette, arrive pour prendre le relais d’Irma. Soudain, Greg se fâche et pique une grosse colère. Je l’emmène avec moi dans la salle de décompression où il y a une grande piscine à boules qui peut le calmer. Et là, j’entends Mistinguette : « Et bein, on va passer une après-midi mouvementé. » Là, j’aurai envié d’un bazooka pour la disperser aux quatre coins de la terre. Mais non, cela se fait pas entre collègues. On reste courtois et poli pour ne pas….. bref.

13 h 37 : J’entends Guinguette engueuler un jeune. Je soupire discrètement. Greg, m’ayant vu, prend ma main droite et le pose sur sa joue gauche. Touchant mais je me reprends.

14 h 00 : Notre chef de service passe alors que j’étais en train de gronder avec tact Calvin qui se tapait. Et là, Le manitou reprend en tapant sur la main pour lui dire que ça ne se fait de se faire mal. Je respire très fort et ne dit rien. Mais je sens que ça bouillonne à l’intérieur de moi.

16 h 00 : J’ai passé un temps de musique agréable avec trois des jeunes. Ils se sont déchaînés sur les tambourins, les triangles et avec du rythme en plus. Ils ont énormément progressé. Nous allons goûter. J’étais passé voir Mistinguette à son atelier cuisine. Elle a tout fait à leur place et a empêché Huguette de lécher le chocolat qui restait dans la casserole.

16 h 35 : Les premiers parents arrivent pour aller chercher leurs mômes.

16 h 45 : Mistinguette est parti avec sa grosse camionnette pour ramener quelques jeunes chez eux.

17 h 00 : Il reste encore Félix qui s’agite, impatient. Je l’emmène dans la cour où il sautille autour du toboggan.

17h10 : Félix est parti avec son père sur une grosse side-car. Et moi, je vais enfin vers ma voiture, tout en sautillant.

FIN

L’exil de Dylan, mineur étranger isolé (1/2)

(Fiction inspirés de faits réels. Où les rôles sont inversés. Là, la France est en guerre et le Ghana est un pays industrialisé bien loti).

C’est pourri. Un merveilleux pourri mais pourri quand même. Je suis même dans la merde la plus complète. J’ai pourtant quitté mon pays pour un monde meilleur. Enfin, je l’espérais. J’ai galéré, souffert mais aucune récompense de mes efforts. J’en ai eu un tout petit peu. Mais de la poudre aux yeux. Je suis d’origine d’une banlieue française où j’ai du fuir la violence et la haine. Mais ça, je ne l’ai pas trop raconté à ceux qui m’ont accueilli ici. Ici, au Ghana où tout me semblait facile par les médias en France. Je baragouine un peu la langue du pays mais je ne dis pas d’où je viens. Il risquerait de me renvoyer chez moi, où je me ferai tuer à l’arrivée. Mais ça ils ne comprennent pas. Surtout ils ne veulent pas me croire. J’ai une carte d’identité mais ils disent que c’est un faux. Le pire, c’est qu’ils me font douter. Mais non, je m’appelle bien Dylan Capritain et j’ai 15 ans. Pour eux, j’ai bientôt 18 ans. A croire qu’ils cherchent un prétexte pour me mettre à la rue. Je ne demande qu’une chose, servir à quelque chose, être utile et m’en sortir. Heureusement, je suis dans un foyer où les éducateurs se démènent à fond. Je ressens leurs impuissances car les politiques nous baladent de droite à gauche, et de plus en plus bas. Et tout ce que j’ai enduré ? Je ne peux qu’en parler au chat du foyer. Enfin, j’exagère un peu. J’ai déjà raconté mon histoire aux éducs, à mes potes mais ils ont du mal à écouter. C’est tellement énorme, invraisemblable. Surtout ma traversée de la méditerranée et du désert pour arriver jusqu’au Ghana.
Le plus dur, c’est d’être accusé de tous les maux alors que je n’ai rien fait. Un vol au foyer ? Tout de suite, on me soupçonne. Un tag injuriant sur le mur de mon lycée. On me regarde de travers. Quand je vais dans le bus, je sens mes voisins tenir leurs poches et être méfiant.
Bref, avec ma gueule d’étranger, je n’inspire pas confiance. Un blanc parmi les noirs, ça fait tache. Et pourtant, je ne suis pas complètement blanc. Je suis bronzé par ma mère. Mais ça, ils ne l’entendent pas. Alors, j’essaie malgré tout de monter le meilleur de moi-même malgré des angoisses qui me prennent la gorge et la poitrine, la nuit. Parait que je fais une mauvaise tête le matin. Je ne dis pas à mes voisins d’infortune du foyer que je rêve toujours la même chose. Le cauchemar qui a précipité mon départ de France. La colère que j’ai ressenti et une énorme tristesse. Mais ça, peuvent-ils le comprendre. Heureusement, j’arrive à écrire sur mon cahier de brouillon que je cache dans mes affaires, dans une petite malle fermée à clé. On m’a donné la possibilité de protéger mes secrets. Au moins, c’est un point positif.

( A suivre…)